Publié le 18/10/2024
Mis à jour le 25/10/2024
Durée de lecture estimée : 14 minutes
Akram
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N*E*R*D
« You can't be me, I'm a rockstar I'm rhyming on the top of a cop car »
Rock Star
Précédemment :
Partie 1 -> Introduction
Partie 2 -> Ma Rencontre avec The Neptunes
Partie 3 -> Teddy Riley
Partie 4 -> Chad
Partie 5 -> Pharrell
A côté de leur taf en tant que beatmaker pour la crème de la musique, le duo n’oublie pas d’où il vient et décide de garder une bulle d’air frais en créant un groupe avec un troisième membre Shay, ami d’enfance de Pharrell lui aussi musicien, batteur comme Pharrell et qui aura des couplets ici et la tout en assurant les backs lors des nombreux live du groupe.
N*E*R*D, abréviation de No One Ever Really Dies, ou tout simplement de NERD car Chad et Pharrell ayant dit dans plusieurs interviews qu’ils étaient un peu considérés comme des NERD dans leur école ! Mais des NERD cool dixit Pharrell. Le groupe est au début l’activité annexe du groupe, un bol d’air frais qui leur permettra de se faire un nom dans la musique en faisant tout simplement ce qu’il aime, ce qu’ils ont toujours aimé.
Concernant la création des N*E*R*D, celui qui en parle le mieux c’est Pharrell lors de son interview Drink Champs
« N*E*R*D a été créé il y a très longtemps, nous essayions en tant qu'artiste comme les Neptunes d'obtenir un accord, mais cela ne s'est jamais produit parce que j'étais juste trop fou et le temps n'était encore venu et je n’avais pas le temps d’attendre et dans le contexte de l’époque, ça n’avait pas de sens.
A cette époque j'étais tellement moi-même à l'époque que je m'en foutais, je gardais juste le rappeur ou quoi que ce soit ... »
Le temps passe, ils produisent le premier album de Kelis, c’est une énorme réussite, Virgin la maison de disque voit le potentiel en tant qu’artiste et pas seulement en tant que hitmaker, la maison de disque leur dit finalement, "et pourquoi vous ne sortez pas un album que vous appellerez The Neptunes ?" mais ils n’étaient pas d’accord, ils ont voulu dissocier le duo de prodos et les artistes en créant leur propre groupe N*E*R*D. Ayant déjà taffé sur plusieurs morceaux, c'est à ce moment la que sort leur 1er album.
2001, In Search Of…
L'album arrive sur la toile en aout 2001, plutôt confidentiel dans un premier temps, il surprend parce qu’il est à des années lumières de ce que fait le duo en tant que producteur, bien qu’abusant des caisses claires comme sur absolument toutes leurs productions, tout le reste est différent et n’est pas spécialement Hip Hop hormis peut-être le premier single Lapdance et les couplets des membres des Clipse sur deux autres morceaux de l’album Truth or Dare et Am I High. Nous sommes donc en 2001 et c’est acté, leur public sait déjà que le duo ne se contentera pas d’être Hip Hop.
Mixe parfait entre le Rap et le Rock, teinté d’Electronique et de mélodies un peu partout, une partie de la fanbase fut surprise et n’a pas spécialement adhéré de suite, le tout de suite étant à mes yeux important car c’est le type d’album qui au fil des ans deviendra à mon sens un incontournable, en tout cas pour tous les aficionados du groupe, In Search Of… a lancé un groupe qui fera 4 albums ensuite, groupe qui sera en 2017 l’un des rares liens qui continuera d’unir encore Chad et Pharrell, ce groupe mine de rien, c’est une grande partie des Neptunes.
Bien que confidentiel en 2001, l’album fait preuve d’une ingéniosité rare qui plus de 20 ans après est maintenant considéré comme un classique par beaucoup, à chercher à se faire plaisir en étant eux même, ils ont marqué toute une génération d’adolescent comme a pu en témoigner le regretté Virgil Abloh pour le NY Times.
" In Search of a décrit pour toute une génération de jeunes enfants noirs et d'artistes qui ont depuis été déterminés à être eux-mêmes, à sauter par cette porte qui a été ouverte par Pharrell »
L’album a d’ailleurs eu plusieurs vies, la version de base aux sonorités plus Electronique, puis une seconde version enregistrée avec un band de rock Spymob afin de donner une sonorité plus live aux morceaux, surtout aux niveaux des drums, à titre personnel je n’ai pas de version préférée, mais c’est à mon sens important de les voir capable de réenregistrer des morceaux afin de leur donner un truc en plus Chad dira qu’à ses yeux il manquait un petit truc, ce petit truc c’était cette version Rock
Pharrell résumera parfaitement l’album et son peu de succès (hormis d’estime) lors de sa sortie :
« The album is too white for black radio and too black for white radio »
En tout cas avec des morceaux comme Lapdance et son beat incroyable ou bien encore Things Are Getting Better et son énergie folle, la complicité entre Pharrell et Kelis sur Truth or Dare ou le coup de poing dans la face Rockstar, l’album ne manque pas de morceaux très bons et marquants. Il sait également devenir plus intimiste avec des morceaux comme Provider ou Bobby James ou le groupe parle d’un type introverti malmené au lycée, qui finit par se droguer et qui finira forcément mal…
Pour moi, dans la discographie du duo, que ce soit pour les Neptunes ou N*E*R*D, In Search Of… est à placer en tant que monument. Parce qu’elle leur a permis d’être eux même et de se lancer en tant qu’artiste, de s’affranchir indirectement des Neptunes et qui on peut le dire, plus de 20 ans après, c’est un album qui a indéniablement marqué une génération, c’est un album que j’écoute toujours beaucoup, dont la tonalité et la profondeur de production ne cesse de me surprendre, surtout que je jongle facilement entre les deux versions.
Après la sortie de l’album, le groupe part en tournée, un peu partout dans le monde, ils font les festivals et réussiront à faire parler d’eux via l’énergie folle qui se dégage de leur performance live. Une chose est certaine, Chad et Pharrell n’ont jamais été plus eux même que lorsqu’ils se sont retrouvés en tant que N*E*R*D.
2004, Fly Or Die
Presque trois années passent pour la sortie du second album du groupe, qui arrivera dans les bacs le 23 mars 2004. Entre temps The Neptunes ont révolutionné le monde de la Pop, nous y reviendrons dans un prochain chapitre, mais ils ont décidé de ne surtout pas délaisser N*E*R*D.
Pour le coup, l’album pousse le délire encore plus loin, il n’y a pas une seconde Rap dessus, c’est du Rock teinté de Pop ici et la ou ils jouent absolument tout les instruments. Preuve en est qu’ils ont toujours soif de se perfectionner et de ne pas reposer sur leurs acquis, Chad et Pharrell décide de se perfectionner sur les instruments qu’ils ne maitrisent pas complètement afin de pouvoir jouer la totalité des enregistrements live. Chad dira à MTV :
« C'est nous qui jouons des instruments cette fois. J'ai commencé à jouer de la guitare l'année dernière, donc j'apprends au fur et à mesure. Pharrell joue de la batterie. Pour In Search Of, nous n'avions pas le temps d'apprendre certains instruments alors nous avions demandé à Spymob de nous aider »
L’album marque une scission encore plus importante au sein des fans de The Neptunes, mais ils s’en moquent ceux qui aiment les Neptunes n’ont aucune obligation d’aimer N*E*R*D. Fly or Die est porté par un single phénoménal She Wants To Move, morceau entrainant à l’énergie folle ou la batterie répond à la boucle dingue de basse, le tout sublimé par la guitare avec une boucle de piano qui s’immisce ici et la, tout simplement grandiose ! Un des morceaux les plus marquants du duo. Le morceau aura d’ailleurs le droit à un remix incroyable avec Common, Mos Def mais surtout des artistes phares pour le duo Q-Tip & De La Soul.
Assumant le côté Rock, ils inviteront également Lenny Kravitz afin de jouer de la guitare sur deux morceaux Drill Sergeant / Preservation et Trasher à côte Questlove du groupe The Roots qui apporte sa science des drums sur le morceau Maybe.
La chose marquante de Fly or Die, au-delà de la musicalité et du fait qu’ils ont su surprendre et renouveler leur son, c’est que l’auditeur peut se rendre compte à quel point le duo a su évoluer en tant qu’arrangeur et mixeur de son, ils ont indéniablement passé un cap à mon sens sur cet album avec des arrangements incroyables du début à la fin.
2008, Seeing Sounds
Il faudra attendre plus de 4 ans afin de pouvoir écouter le nouvel album de N*E*R*D, Seeing Sounds sort le 10 juin 2008 et les critiques ne se trompent pas, d’emblée N*E*R*D est présenté comme un groupe de Rock Alternatif, les Neptunes sont loin derrière et l’une des premières réussites du groupe c’est d’avoir fait oublier aux listeners d’où ils viennent, à l’époque le groupe a même très déjà bonne réputation dans chez les personnes n’écoutant pas de Rap.
Une anecdote assez drôle, un de mes amis achète l’album, je lui demande s’il connait un peu le background du groupe… et bien non, lorsque je lui annonce que les types qui sont aux manettes de ce groupe sont les mêmes personnes qui ont produit Slave 4 U de Britney Spears il a du mal à me croire... eh oui.
Pour lancer la promotion de l’album Pharrell dira en interview
"We didn't care about genres, we're not doing this for the money,"
Le ton est donné. Seeing Sounds est un album qui continue de faire avancer le groupe vers des contrées encore plus éloignées du Rap. Le seul moment Rap de l’album est une bonus track, remix du morceau Everyone Nose (All the Girls Standing in Line for the Bathroom) avec en featuring Kanye West, Lupe Fiasco et Pusha T.
L’album a été créé pour ne faire qu’un avec le public et pouvoir avoir des échanges encore plus fort lors de leur live, il est important de bien assimiler que N*E*R*D est un groupe qui se nourrit de ses performances, du coup comme sur Fly or Die, les instruments jouent un rôle fondamental dans l’appréciation du skeud, le groupe de Rock Spymob, les mêmes ayant rejoué les instruments pour la Version Rock d’In Search of sont une nouvelle fois en studio avec le groupe.
Mais le point que je trouve le plus pertinent, c’est qu’ils vont continuer à évoluer en tant qu’artiste et se donner un nouvel objectif, comme à chaque nouvelle sortie finalement, sur Seeing Sound, la synergie avec le public est la priorité. Chad dira à ce sujet que lorsqu’ils étaient en studio :
« Seeing Sounds, c'est revenir à nos racines, nous voulons juste faire bouger les gens »
L’album reflète bien l’évolution du duo depuis plus de 10 ans dans l’industrie de la musique, le truc qui me parle pas mal sur Seeing Sounds c’est qu’en plus d’avoir des arrangements assez dingues, il revient un peu aux bases lorsqu’on connait le background du duo, Chad s’amuse par exemple à jouer du saxophone sur Yeah You, un morceau à la saveur particulière.
Pour conclure sur Seeing Sounds et tout comme Chad, mon morceau préféré de l’album c’est Kill Joy, morceau à l’énergie folle, qui regroupe pas mal des meilleurs ingrédients des Neptunes, morceau qui puise sa force dans la Funk et le Rock avec des arrangements vocaux indéniablement au-dessus du lot !
« Kill Joy An N*E*R*D film, starring YOU ! Also starring, HIM
Color provided by "Seeing Sounds" Good night »
2010, Nothing
Il faudra attendre seulement deux années afin d’avoir un nouvel album du groupe, portait par la tournée de Seeing Sounds, le groupe boucle rapidement les dix morceaux. Pour le coup on revient un peu aux sources, d’entrée sur le morceau Party People il y a un couplet du rappeur d’Atlanta T.I., très en vogue à l’époque.
« People don’t wanna think no more
they just wanna feel » Hot n Fun
Le groupe sort rapidement deux singles, Hot n Fun feat Nelly Furtado, single efficace portait par une sacrée ligne de basse mais au message lambda, puis enchaine avec Hypnotize You, titre au potentiel commercial certains, produit par les français de Daft Punk avec qui Pharrell connaitra un succès fou en 2013 comme déjà dit dans le chapitre précédent. Succès mitigé dans les deux cas, bonne presse deux clips mais ça reste plutôt confidentiel et Hot n Fun ne dépassera pas la 30éme place du top 100 Billboard.
L’album est un des moins apprécié par la presse qui se montrera très critique. C’est d'ailleurs un des moins bien noté par les fans sur des sites comme Metacritic, on sent tout de même une fin de cycle et ce malgré quelques très bons morceaux, c’est également l’album qui me parle le moins, moins expérimental, indéniablement plus grand public, il manque souvent de punch, ce qui faisait indéniablement la force du groupe sur le précédent album.
D’ailleurs il est marrant de regarder comment sont notés l'ensemble des albums sur Metacritic, je ne prends que le User Score, car il faut donner la voix au peuple.
1 – In Search Of Version Electronique avec une moyenne de 8.7
2 – In Search Of Version Rock avec une moyenne de 8.5
3 – Seeing Sounds avec une moyenne de 8.3
4 – No One Ever Really Dies avec une moyenne de 7.6
5 – Fly or Die avec une moyenne de 7.5
6 – Nothing avec une moyenne de 6.8
Ça reste tout de même un album avec de beaux moments comme I’ve Seen The Light / Inside of Clouds et ce saxophone by Chad qui suit le morceau tout du long. Ensuite, il faudra du temps avant que le groupe prenne le temps de se réunir à nouveau. Pour le meilleur ? c’est ce que nous allons voir.
2017, No One Ever Really Dies
7 ans, c’est donc le temps qu’il aura fallu au groupe afin de sortir leur 5éme et toujours dernier album à ce jour, No One Ever Really Dies, soit leur signification de N*E*R*D.
Pour le coup c’est un retour aux sources, l’album est très orienté Hip Hop que ce soit dans les productions et les feats, l’album de onze morceaux voit se succéder au mic : Rihanna, qui rap et plutôt bien donc le couplet a été écrit par Pharrell, Gucci Mane et Wale sur le morceau Voilà, Future sur le politique 1000, Kendrick Lamar par deux fois, la britannique M.I.A. et enfin le très rare MC d’Outkast Andre 3000. (Bon il y a aussi Ed Sheeran, mais on s’en fou un peu)
L’album fut une très bonne surprise, car se payer un premier single avec Rihanna c’est un joli coup, mais se payer une Rihanna qui dénote en rappant ce fut un épique win, surtout que le morceau est remarquablement produit avec des variations au niveau du beat qui apporte un plus indéniable.
« Holy shit, it’s working, no more trail of tears
Holy shit, it’s working, the prophecy is here
Holy shit, it’s working, we’re wreckin' this bih
Holy shit, it’s working, one thousand percent »
1000
C’est rare de voir le groupe s’engager politiquement (surtout vu les récents propos de Pharrell) mais il est indéniable que le morceau One Thousand (ou One Zero Zero Zero) en place une pour les inégalités avec une référence subtile au Trail of Tears, qui amena le déplacement forcé de plusieurs peuples natif américains entre 1831 et 1838, l’album critique un peu partout sur ce que pourrait devenir les Etats-Unis, enfin plutôt ce qu’elle est déjà mais là n’est pas mon propos et c’est une première dans l’histoire.
Mais le groupe ne s’arrête pas là, il s’attaque aux violences policières, parle des droits des transgenres, comme si après 20 ans de carrière il était temps de se poser de vraies questions, cette prise de position est appréciable à mon sens, tant la voix de Pharrell peut avoir un impact (enfin, la encore si c’est pour prendre le temps de rencontrer Macron comme en 2023 autant laisser tomber).
Détail plutôt amusant, ils se sont amusés à sampler le « Mad Ethnic Right Now » d’une vidéo devenu virale, leur utilisation est assez pertinente tout le long de l’album.
Pour ma part histoire, j’ai une affection toute particulière pour le morceau Lightning Fire Magic Prayer, morceau qui résume bien la qualité à la prod du duo, long de plus de 7 minutes, il propose une montée en puissance et des variations tout le long du morceau avec des bridges superbe et surprenant, c’est indéniablement sur ce type de son que je les attends aujourd’hui. C’est un album cohérent et engagé et forcément cette vision me parle beaucoup.
Récemment, je me suis également rendu compte qu’un album live enregistré en 2016 lors d’un concert à Sydney, N*E*R*D Live at The Babylon est sorti en 2018. L’objet est sur toutes les plateformes de streaming et même trouvable assez facilement en vinyle. Après écoute c’est un beau concert, un rendu avec les instruments en live tout bonnement excellent, le tout avec un public réceptif, indéniablement connaisseur du groupe et reprenant en cœur chaque refrain. Je ne peux que vous en conseiller l’écoute.
Nous terminons donc la partie dédiée au N*E*R*D. Avant de s’attaquer à une autre partie importante du duo, il est important de noter que pas de Neptunes sans N*E*R*D, au-delà de leur talent de compositeur, de producteur, de songwriter, ce groupe leur a permis d’être des artistes en tant que tel, de parcourir le monde afin de faire leur propre show et ça a indéniablement été une bulle d’air pour Chad et Pharrell de sortir de l’ombre des studios, de grandir en tant que groupe et non pas en tant que Prodo, cette parenthèse est si importante qu’elle leur a permis de faire 5 albums studios, et de se retrouver en 2017 même lorsque The Neptune a commencé à ne plus produire ensemble ou beaucoup moins….
Prochain Chapitre - Stark Trak Partie 1